« Le Ventre de l’hôpital »
Les photographies argentiques réalisées à l’hôpital Laennec de Quimper répondaient à une demande qui avait mobilisé une plasticienne Annick Lecuyer, les élèves des Beaux-Arts, et moi-même. Lors d’une visite guidée de deux heures, nous avons pu photographier plusieurs salles et équipements. La demande de l’établissement, le parcours guidé et restreint, la lumière homogène, tout comme la brièveté de l’immersion ont constitué des contraintes fortes qui m’ont conduit à choisir de travailler en argentique pour retrouver la tension exigée dans la prise de vue qui ne permet pas au photographe de voir son travail et le pousse a un regard totalement concentré et appuyé. La promesse d’une image imposée par ce médium (contrairement au numérique), l’impossibilité d’un accès et d’une correction immédiate nécessitent une concentration spécifique, une immersion plus totale et crée un sentiment d’urgence qui m’a paru pertinent dans ce cadre. J’ai retranscrit le morcellement et la spécificité des espaces à travers une mosaïque de photographies en noir et blanc qui met en valeur les lignes et formes des appareils, du mobilier et de l’architecture. Ces lignes sont tantôt géométriques, favorisant une ergonomie utile, tantôt plus organiques (tuyaux, gaines, tubes) laissant place à l’imaginaire. Le corps, qui pourtant est au centre des soins, n’est évoqué qu’à travers des sabots rangés ou un lit d’hôpital vide. Le noir et blanc évoque avec sobriété un univers aseptisé et fonctionnel. Les lettres imprimées en vert sur certaines photos dessinent le mot « silence » et répondent à la frise inférieure. Ce parti pris artistique renforce le rythme de l’assemblage par une architecture photographique. Exposée dans le hall de l’hôpital, cette mosaïque évoque un lieu de travail et un lieu de soin.