Ce projet, qui a produit une exposition publique en juillet 2015, a été mené avec Sheila Le Nost, plasticienne des Beaux-Arts, auprès d’élèves en décrochage scolaire accueillis dans le « Dispositif Relais du Likès ». Le thème retenu pour ce projet, la ville, a permis à ce public dit difficile de travailler en extérieur au cours d’ateliers photographiques les conduisant à appréhender physiquement l’attachement, si ce n’est l’enracinement, dans un environnement urbain. Les notions de parcours et de lien semblaient particulièrement pertinentes pour ces élèves scolairement hors parcours et en rupture.
Lors des ateliers que j’ai mis en place, les élèves ont réalisé des photographies de la ville et d’eux-mêmes à l’aide de miroirs. Ce dispositif ludique, mais qui s’inscrit dans l’histoire de la photographie, a permis de construire des images-patchwork dans lesquelles la ligne séparant les plans est à la fois un écart et une charnière. Ces photos sont des points de vue sur le lieu où nous sommes, sur les autres, ce qu’ils sont et ce que nous sommes, ce que nous en voyons. Il s’agit de rétablir une subjectivité dans le rapport au cadre de vie et aux autres alors que leur vision est souvent dictée par des normes : comment limiter leur regard à un point de vue alors que leur vie est à construire ? Les ateliers photo ont tenté de bousculer les idées reçues et les codes. Les élèves ont également travaillé sur l’effet créé par l’inversion des valeurs et la retouche photographique. D’autres séances ont été organisées autour d’une contrainte (photographier le mur d’un jardin, photographier tout en marchant sur un rail, etc.).
Au cours de ce projet, j’ai été frappé par la manière dont les déplacements, les mouvements et les gestes ont stimulé et facilité la prise d’images pour ces élèves et par la façon dont l’artifice technique (miroir, filtre, projection) a pu servir de prélude à une pratique plus introspective. Les élèves ont découvert la photographie dans une relative diversité, mais aussi appris à regarder leur ville autrement et se découvrir. Je les ai aussi découverts en étant attentif à ce qu’ils avaient besoin d’exprimer individuellement.
Grâce au soutien généreux du labo-photo Studio Ludo à Angers, 40 photos en 0,90 x 0,60 m ont été exposées dans la ville de Quimper, une source de fierté incomparable pour des jeunes en échec.